I. - le droit antérieur aux Ordonnances "Macron".
Selon le premier alinéa de l’article L2325-43 du code du travail,
« l'employeur verse au comité d'entreprise une subvention
de fonctionnement d'un montant annuel équivalent à 0,2 % de la
masse salariale brute ».
Et la Cour de cassation avait précisé que « la masse salariale de référence
servant d'assiette à la contribution patronale aux activités
sociales et culturelles du comité d'entreprise n'est pas différente
de la masse salariale servant au calcul de la subvention de
fonctionnement » (Soc. 2 décembre 2008, nº 07-16615,
Bull. nº 241).
Or – c’est là l’essentiel – la masse salariale brute
n’est définie ni par le code du travail, ni le code de la sécurité
sociale, ni le plan comptable général.
Avant son revirement du 7 février 2018, la cour régulatrice retenait que « sauf
engagement plus favorable, la masse salariale servant au calcul de la
contribution patronale aux activités sociales et culturelles et au
calcul de la subvention de fonctionnement versée par l'employeur au
comité d'entreprise s'entend de la masse salariale brute
correspondant au compte 641, à l'exception des sommes qui
correspondent à la rémunération des dirigeants sociaux, à des
remboursements de frais, ainsi que celles qui, hormis les indemnités
légales et conventionnelles de licenciement, de retraite et de
préavis, sont dues au titre de la rupture du contrat de travail »
(Soc. 20 mai 2014, nº 12-29142, Bull. nº 123 – confirmé par Soc.
9 juillet 2014, nº 13-17470, Bull. nº 189).
Les employeurs souhaitaient à l'inverse que l'on se fonde l'assiette des cotisations sociales du régime général qui est définie à l'article L242-1 du code de la sécurité sociale et donc que, concrètement, on ne retiennent que les sommes qui figurent sur l’ancienne « déclaration annuelle des données
sociales » (DADS) qui va progressivement être remplacée par
la « déclaration sociale nominative » (DSN).
Quelle différence cela implique concrètement ?
Comme la DADS, le compte 641 recense les salaires nets versés aux
salariés et les charges salariales correspondantes mais – à
l’inverse de la DADS où elles ne sont pas mentionnées – le
compte 641 comptabilise également toutes les primes et
gratifications allouées aux salariées, ainsi que les indemnités
versées aux salariés, notamment les indemnités de licenciement ou
celles de ruptures conventionnelles et enfin les avantages en nature (sur cette différence, cf. not. https://www.compta-facile.com/charges-de-personnel-comptes-64/ pour le compte 641 https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/F23892 pour la DADS).
En résumé, l'assiette du compte 641 du plan comptable général est plus large que l'article 242-1 du code de la sécurité sociale et la DADS qui en découle.
II. - Le revirement de jurisprudence du 7 février 2018.
Par
deux arrêts du 7 février 2018, la Cour de cassation a opéré un
revirement de jurisprudence et les
arrêts ont fait l’objet de la plus grande diffusion, puisqu’ils
ont été publiés sur le site internet de la Cour de cassation avec
une note explicative (https://goo.gl/gNqE8P).
Dans
l’arrêt n°307, la cour régulatrice retient :
« Vu les articles L. 2323-86 et L. 2325-43 alors
applicables, et L. 3312-4 du code du travail ;
Attendu que l’évolution de la jurisprudence, qui
a exclu de l’assiette de référence du calcul de la subvention de
fonctionnement et de la contribution aux activités sociales et
culturelles diverses sommes figurant au compte 641 mais n’ayant pas
la nature juridique de salaires, conduit à priver de
pertinence le recours à ce compte pour la mise en oeuvre des
dispositions des articles L. 2325-43 et L. 2323-86 du code du travail
;
Attendu que, sauf engagement plus favorable, la masse salariale
servant au calcul de la subvention de fonctionnement comme de la
contribution aux activités sociales et culturelles, s’entend de la
masse salariale brute constituée par l’ensemble des gains et
rémunérations soumis à cotisations de sécurité sociale en
application de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale
; qu’aux termes de l’article L. 3312-4 du code du travail,
les sommes attribuées en application de l’accord d’intéressement
n’ont pas le caractère de rémunération au sens de l’article L.
242-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que contestant l’assiette de
calcul de la subvention de fonctionnement et de la contribution aux
activités sociales et culturelles appliquée par l’entreprise, le
comité d’entreprise de la société Revillon chocolatier a, par
acte du 7 novembre 2013, saisi le tribunal de grande instance pour
obtenir paiement d’un rappel de chacune de ces subventions ;
Attendu que pour condamner l’employeur à payer certaines sommes
au titre de la subvention de fonctionnement et de la contribution aux
activités sociales et culturelles du comité d’entreprise, l’arrêt
retient qu’il est de principe constant que, sauf engagement plus
favorable qui n’est pas caractérisé en l’espèce, la masse
salariale servant au calcul de la subvention de fonctionnement au
comité d’entreprise et de la contribution aux activités sociales
et culturelles s’entend de la masse salariale brute correspondant
au compte 641 « rémunérations du personnel » tel que défini par
le plan comptable général, à l’exception des sommes
correspondant à la rémunération des dirigeants sociaux, à des
remboursements de frais, ainsi que celles qui, hormis les indemnités
légales et conventionnelles de licenciement, de retraite et de
préavis, sont dues à la rupture du contrat de travail ; que les
sommes payées à titre de provision sur intéressement ne sauraient
être déduites de la base de calcul comme constituant un élément
de rémunération à caractère salarial ;
Qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes
susvisés ; » (Soc. 7 février 2018 n°16-16086)
Dans
l’arrêt n°303, la haute juridiction retient :
« Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 22 juillet
2016), que le 21 février 2014, le comité d’entreprise de l’UES
ATOS Intégration a saisi le tribunal de grande instance aux fins
d’obtenir la condamnation de l’employeur à lui verser un rappel
sur les sommes lui étant dues au titre de la subvention de
fonctionnement et de la contribution aux activités sociales et
culturelles depuis 2008 ;
Attendu que le comité d’entreprise fait grief à l’arrêt de
le débouter de sa demande de rappel alors, selon le moyen, que :
1°/ sauf engagement plus favorable, la masse salariale servant au
calcul de la contribution patronale aux activités sociales et
culturelles et de la subvention de fonctionnement du comité
d’entreprise s’entend de la masse salariale brute correspondant
au compte 641 du plan comptable général à l’exception des sommes
qui correspondent à la rémunération des dirigeants sociaux, à des
remboursements de frais, ainsi que celles qui, hormis les indemnités
légales et conventionnelles de licenciement, de retraite et de
préavis, sont dues au titre de la rupture du contrat de travail ;
qu’en écartant, en l’espèce, toute référence au compte 641
pour dire que la masse salariale brute permettant de fixer le montant
du budget de fonctionnement et du budget des activités sociales et
culturelles du comité d’entreprise devait être calculée à
partir des DADS des sociétés composant l’UES et débouter en
conséquence le comité d’entreprise de ses demandes, la cour
d’appel a violé les dispositions des articles L. 2323-86 et L.
2325-43 du code du travail ;
2°/ les provisions à valoir sur toutes sommes de nature
salariale doivent être incluses dans la masse salariale brute
servant au calcul de la subvention de fonctionnement et de la
subvention patronale aux activités sociales et culturelles du comité
d’entreprise ; qu’en décidant en l’espèce que les provisions
sur congés payés ne devaient pas être prises en compte dans la
base de calcul de cette masse salariale brute, la cour d’appel a
violé les dispositions des articles L. 2323-86 et L. 2325-43 du code
du travail ;
3°/ les indemnités légales et conventionnelles de licenciement
et de retraite versées au titre de la rupture du contrat de travail
des salariés concernés doivent être incluses dans la masse
salariale brute servant au calcul de la subvention de fonctionnement
et de la subvention patronale aux activités sociales et culturelles
du comité d’entreprise ; qu’en considérant en l’espèce qu’il
n’y avait pas lieu d’inclure dans la base de calcul de cette
masse salariale brute « la partie indemnitaire des sommes versées
aux salariés licenciés ou ayant quitté la société à la suite
d’un plan social », précisant que cette « partie indemnitaire »
incluait notamment les indemnités légales ou conventionnelles de
licenciement, la cour d’appel a de nouveau violé les dispositions
des articles L. 2323-86 et L. 2325-43 du code du travail ;
4°/ pendant le temps de leur mise à dispositions, les salariés
sont présumés être intégrés de façon étroite et permanente à
la communauté de travail de l’entreprise d’accueil si bien que
leur rémunération doit être prise en compte dans le calcul de la
masse salariale brute servant au calcul de la subvention de
fonctionnement et de la subvention patronale aux activités sociales
et culturelles du comité d’entreprise de cette entreprise ; qu’en
conséquence, il appartient à l’employeur qui entend voir ces
rémunérations exclues du calcul de la masse salariale brute de
rapporter la preuve de l’absence d’intégration étroite et
permanente des salariés mis à disposition ; qu’en l’espèce,
pour retenir qu’il ne fallait pas inclure dans la masse salariale
brute le montant des rémunérations des salariés mis à la
disposition de l’entreprise, la cour d’appel a relevé qu’aucun
élément ne permettait d’établir que ces salariés mis à
disposition étaient, au cas d’espèce, complètement intégrés à
la communauté de travail ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel
a encore un fois violé les dispositions des articles L. 2323-86 et
L. 2325-43 du code du travail ;
Mais attendu que l’évolution de la jurisprudence, qui a exclu
de l’assiette de référence du calcul de la subvention de
fonctionnement et de la contribution aux activités sociales et
culturelles diverses sommes figurant au compte 641 mais n’ayant pas
la nature juridique de salaires, conduit à priver de pertinence le
recours à ce compte pour la mise en oeuvre des dispositions des
articles L. 2325-43 et L. 2323-86 alors applicables du code du
travail ;
Attendu d’abord que, sauf engagement plus favorable, la masse
salariale servant au calcul de la subvention de fonctionnement du
comité d’entreprise comme de la contribution aux activités
sociales et culturelles, s’entend de la masse salariale brute
constituée par l’ensemble des gains et rémunérations soumis à
cotisations de sécurité sociale en application de l’article L.
242-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu ensuite qu’il résulte des articles L. 1251-24 et L.
8241-1 du code du travail que les salariés mis à disposition ont
accès, dans l’entreprise utilisatrice, dans les mêmes conditions
que les salariés de cette entreprise, aux moyens de transport
collectif et aux installations collectives, notamment de
restauration, dont peuvent bénéficier ces salariés ; que
lorsque des dépenses supplémentaires incombent au comité
d’entreprise de l’entreprise utilisatrice, celles-ci doivent lui
être remboursées suivant des modalités définies au contrat de
mise à disposition ; qu’il en découle que la
rémunération versée aux salariés mis à disposition par leur
employeur n’a pas à être incluse dans la masse salariale brute de
l’entreprise utilisatrice servant de base au calcul de la
subvention de fonctionnement et de la contribution aux activités
sociales et culturelles ;
Et attendu que c’est dès lors à bon droit que la cour d’appel
a refusé d’intégrer dans la masse salariale brute les
provisions sur congés payés, les indemnités légales et
conventionnelles de licenciement et les indemnités de retraite,
ainsi que les rémunérations versées aux salariés mis à
disposition par une entreprise extérieure, toutes sommes qui ne
figurent pas dans la déclaration annuelle des données sociales de
l’entreprise ;
D’où il suit que le moyen, inopérant en sa quatrième branche,
n’est pas fondé pour le surplus ; » (Soc. 7 février
2018 n°16-24231)
Le
revirement de jurisprudence est total puisque la nouvelle solution
peut être résumée ainsi :
- la masse salariale servant au calcul de la subvention de
fonctionnement du comité d’entreprise comme de la contribution aux
activités sociales et culturelles est calculée à partir des sommes
qui entrent dans l’assiette des cotisations du régime général de
la sécurité sociale, telle que celle-ci est définie à l'article
L. 242-1 du code de la sécurité sociale : concrètement ces
sommes sont répertoriées sur l’ancienne « déclaration
annuelle des données sociales » (DADS) qui va progressivement
être remplacée par la « déclaration sociale nominative »
(DSN),
- la nouvelle référence à l’article L.242-1 du code de la
sécurité sociale, sans autre précision ou restriction, signifie
que les indemnités de licenciement ne seront prises en compte que
pour leur part soumise à cotisations sociales (au delà de deux fois
le plafond de la sécurité sociale – cf. dernier alinéa de
l’article),
- les sommes attribuées dans le cadre d’un accord d’intéressement
ne sont pas incluses dans la masse salariale, par application de
l’article L3312-4 du code du travail.
A première vue, on pourrait penser qu'avec ce revirement de jurisprudence, la Cour de cassation anticipe l'évolution du code du travail tel qu'il résulte des ordonnances "Macron" de septembre 2017.
Mais on ne saurait en être certain pour autant.
Pour le comprendre, il convient de comparer les textes en vigueur jusqu’au 31 décembre 2017 et ceux qui sont issus de l’ordonnance qui entrera en vigueur au 1er janvier 2018, il en ressort :
Pour la subvention de fonctionnement
| |
En vigueur jusqu’au 31 décembre 2017
|
En vigueur à compter du 1er janvier 2018
|
Article L2325-43 du code du travail
|
Article L2315-61 du code du travail
|
L'employeur verse au comité d'entreprise une subvention de fonctionnement d'un montant annuel équivalent à 0,2 % de la masse salariale brute.
Ce montant s'ajoute à la subvention destinée aux activités sociales et culturelles, sauf si l'employeur fait déjà bénéficier le comité d'une somme ou de moyens en personnel équivalents à 0,2 % de la masse salariale brute.
Le comité d'entreprise peut décider, par une délibération, de consacrer une partie de son budget de fonctionnement au financement de la formation des délégués du personnel et des délégués syndicaux de l'entreprise.
Cette somme et ses modalités d'utilisation sont inscrites, d'une part, dans les comptes annuels du comité d'entreprise ou, le cas échéant, dans les documents mentionnés à l'article L. 2325-46 et, d'autre part, dans le rapport mentionné à l'article L. 2325-50.
|
L'employeur verse au comité social et économique une subvention de fonctionnement d'un montant annuel équivalent à :
1° 0,20 % de la masse salariale brute dans les entreprises de cinquante à deux mille salariés ;
2° 0,22 % de la masse salariale brute dans les entreprises de plus de deux mille salariés.
Ce montant s'ajoute à la subvention destinée aux activités sociales et culturelles, sauf si l'employeur fait déjà bénéficier le comité d'une somme ou de moyens en personnel équivalents à 0,22 % de la masse salariale brute.
Le comité social et économique peut décider, par une délibération, de consacrer une partie de son budget de fonctionnement au financement de la formation des délégués syndicaux de l'entreprise. Il peut également décider, par une délibération, de transférer tout ou partie du montant de l'excédent annuel du budget de fonctionnement au financement des activités sociales et culturelles.
Cette somme et ses modalités d'utilisation sont inscrites, d'une part, dans les comptes annuels du comité social et économique ou, le cas échéant, dans les documents mentionnés à l'article L. 2315-65 et, d'autre part, dans le rapport mentionné à l'article L. 2315-69.
Pour l'application des dispositions du présent article, la masse salariale brute est constituée par l'ensemble des gains et rémunérations soumis à cotisations de sécurité sociale en application des dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ou de l'article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime, à l'exception des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée.
Les sommes effectivement distribuées aux salariés lors de l'année de référence en application d'un accord d'intéressement ou de participation sont incluses dans la masse salariale brute.
|
Pour la contribution en matière d'activités sociales et culturelles
| |
En vigueur jusqu’au 31 décembre 2017
|
En vigueur à compter du 1er janvier 2018
|
Article L2323-86 du code du travail
|
Article L2312-83 du code du travail
|
La contribution versée chaque année par l'employeur pour financer des institutions sociales du comité d'entreprise ne peut, en aucun cas, être inférieure au total le plus élevé des sommes affectées aux dépenses sociales de l'entreprise atteint au cours des trois dernières années précédant la prise en charge des activités sociales et culturelles par le comité d'entreprise, à l'exclusion des dépenses temporaires lorsque les besoins correspondants ont disparu.
Le rapport de cette contribution au montant global des salaires payés ne peut non plus être inférieur au même rapport existant pour l'année de référence définie au premier alinéa.
|
Pour l'application du présent paragraphe, la masse salariale brute est constituée par l'ensemble des gains et rémunérations soumis à cotisations de sécurité sociale en application des dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ou de l'article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime, à l'exception des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée.
Les sommes effectivement distribuées aux salariés lors de l'année de référence en application d'un accord d'intéressement ou de participation sont incluses dans la masse salariale brute.
|
Comme le font apparaître les deux tableaux, dans ses dispositions législatives applicables à compter du 1er janvier 2018, le code du travail prévoit deux choses :
- que la subvention et la contribution du comité d'entreprise / comité social et économique seront calculée à partir d'une masse salariale qui s'identifie à l'assiette des cotisations sociales du régime générale de la sécurité sociale, définie à l'article L242-1 du code de la sécurité sociale et donc concrètement qui figure sur l'ancienne DADS / nouvelle DSN.
- que les sommes versées au titre de l'intéressement seront également incluses dans la masse salariale à prendre en compte.
L'impression qui se dégage ainsi des arrêts du 7 février 2018 est que la Cour de cassation a décidé d'appliquer à moitié les nouvelles dispositions de l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 et qui plus est au détriment des salariés et cela à double titre :
- parce que les sommes figurant sur la DADS/DSN sont plus restreintes que celles figurant au compte 641 du plan comptable général,
- parce que l'intéressement est expressément exclu de la jurisprudence de la Cour de cassation alors qu'il y figure dans les nouvelles dispositions législatives.
Et, sur ce dernier point, l'argument de texte de la cour régulatrice n'est pas parfaitement convaincant : les dispositions des articles L. 2325-43 et L. 2323-86 du code du travail, auxquels la Cour de cassation se réfère, ne renvoient pas à l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, ce renvoi est décidé par la Cour de cassation qui pouvait parfaitement - si elle en avait eu l'envie - y ajouter les sommes versées au titre de l’intéressement.
Certes il est vrai - comme on peut le lire dans le premier arrêt - que selon "l’article L. 3312-4 du code du travail, les sommes attribuées en application de l’accord d’intéressement n’ont pas le caractère de rémunération au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale" mais dans la mesure où il convenait de définir la "masse salariale" au sens des articles L. 2325-43 et L. 2323-86 du code du travail et que ceux-ci ne font aucune référence à l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, la cour régulatrice pouvait parfaitement - comme l'a fait le Législateur ensuite avec les ordonnances Macron - y inclure l'intéressement.
L'impression qui se dégage ainsi du revirement analysé est que l'article L242-1 du code de la sécurité sociale devient une sorte de vortex dont on ne peut échapper pour le calcul de la subventions et contribution du comité d'entreprise / comité social et économique.
En outre, cette référence à l'article L242-1 du code de la sécurité sociale est regrettable car il aboutit à un résultat paradoxal concernant les indemnités de licenciement :
Car dans son dernier alinéa, l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale dispose :
« Est exclue de l'assiette des cotisations mentionnées au
premier alinéa, dans la limite d'un montant fixé à deux fois la
valeur annuelle du plafond mentionné à l'article L. 241-3, la
part des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat
de travail ou de la cessation forcée des fonctions de mandataires
sociaux, dirigeants et personnes visées à l'article 80
ter du code général des impôts qui n'est pas imposable en
application de l'article 80 duodecies du même code. Toutefois, les
indemnités versées à l'occasion de la cessation forcée des
fonctions de mandataires sociaux, dirigeants et personnes mentionnées
à l'article 80 ter du code général des impôts d'un montant
supérieur à cinq fois le plafond annuel défini par l'article L.
241-3 du présent code et celles, versées à l'occasion de la
rupture du contrat de travail, d'un montant supérieur à dix fois ce
même plafond sont intégralement assimilées à des
rémunérations pour le calcul des cotisations visées au premier
alinéa du présent article. Lorsque les mandataires
sociaux, dirigeants et personnes mentionnés à l'article 80 ter du
code général des impôts perçoivent à la fois des indemnités à
l'occasion de la cessation forcée de leurs fonctions et des
indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de
travail, il est fait masse de l'ensemble de ces
indemnités ; la somme de ces indemnités est intégralement
assimilée à des rémunérations pour le calcul des cotisations
mentionnées au premier alinéa du présent article
dès lors que le montant de ces indemnités est supérieur à cinq
fois le plafond annuel défini au même article L. 241-3 ».
Ce
qui – pour simplifier – signifie que les indemnités versées à
l'occasion de la rupture d’un contrat de travail, pour leur montant
supérieur à deux fois la valeur annuelle du plafond de la sécurité
sociale, sont incluses dans l'assiette des cotisations sociales (au
delà des autres seuils, c’est l’intégralité de la somme qui
est soumise à cotisations).
Devrait-on
en déduire que seules ces
indemnités les plus élevées auraient la nature d’une
rémunération puisqu’elles sont soumises à cotisations et non les
autres qui se voient dénuées du caractère d’une rémunération
puisqu’aucune cotisation ne leur est appliquée.
On
voit ainsi apparaître que la logique de l'article L242-1
du code de la sécurité sociale est totalement dissociée de la
nature de rémunération au sens du droit du travail.
Et
il faut mesurer l’incohérence de l’articulation posée entre la
masse salariale et l’article L242-1 du code de la sécurité
sociale.
Pour
les salariés dont la rémunération est la plus modeste, les
indemnités de licenciement seront par conséquent inférieures aux
seuils évoqués dans l’article L242-1 du code de la sécurité
sociale, et ces sommes ne constitueraient pas la masse salariale et
n’entreraient donc pas dans l’assiette de calcul de la subvention
et de la contribution du comité d'entreprise.
Alors
que, pour les salariés dont la rémunération est la plus élevée,
leurs indemnités de licenciement dépasseront certains des seuils
évoqués dans l’article L242-1 du code précité, et seront, soit
pour partie soit en totalité, considérées comme intégrant la
masse salariale et incluses dans l’assiette de calcul de la
subvention et de la contribution du comité d'entreprise.
L’effet
de seuil qui est ainsi mis en évidence est incohérent.
En somme, ce revirement de jurisprudence laisse un goût d'inachevé. De toute manière sa portée demeure transitoire puisque les nouvelles dispositions du code du travail (qui feront l'objet d'une autre analyse) vont désormais s'appliquer.