jeudi 28 octobre 2021

La rechute d'un accident du travail ⚠️

 





Dans sa définition la plus large, il est retenu que « constitue une rechute toute modification dans l’état de la  victime, dont la première constatation médicale est postérieure à la date de la guérison apparente ou de la consolidation     de la blessure » (Civ.2 29 mai 2019 n° 18-13.495 au Bull. Civ.2 4 avril 2018 n° 17-16.017).



Cette définition ne fait que rappeler que la présomption d’imputabilité couvre toutes les lésions qui apparaissent jusqu’à la consolidation de l’état de santé de la victime : il ne peut donc y avoir de rechute tant que l’état de santé de la victime s’est préalablement pas stabilisé.



Si l’on tente à présent de préciser en quoi consiste cette « modification dans l’état de la victime », on peut retenir qu’il s’agit d’une « aggravation de l’état » de la victime qui correspond à « un fait nouveau dans son état séquellaire » (not. Civ.2 22 janvier 2015 n° 13-28.903 – déjà Soc. 11 avril 2002 n° 01-20.331 Soc. 15 mars 2001 n° 98-12.842 Soc. 12 novembre 1998 n° 97-10.140 Bull. n° 491 Soc. 18 juillet 1996 n° 94-21.823 Soc. 17 avril 1996 n° 94-17.362 Bull. n° 172 Soc. 11 janvier 1996 n° 94-10.116 Bull. n° 6 Soc. 2 mars 1995 n° 93-10.180 Soc. 13 janvier 1994 n° 91-12.247 Bull. n° 11).



Ce “fait nouveau” peut constituer soit une “nouvelle lésion”, soit “l’aggravation” d’une lésion qui était déjà apparue avant la consolidation de l’état de santé et qui avait été prise en charge lors de la reconnaissance de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle.



S’il s’agit d’une “nouvelle lésion” – qui ne correspond donc à aucune des lésions apparues lors de l’accident ou de la maladie – il doit être démontré qu’elle est la conséquence “directe et certaine” de l’accident du travail initial (not. Soc. 19 décembre 2002 n° 00-22.482, Bull. n° 401 Soc. 18 janvier 2001 n° 99-16.237 Soc. 19 novembre 1998 n° 97-11.698 Soc. 17 nov. 1944 : JCP 1946. II. 2957).



Mais cette preuve de l’imputabilité à l’accident initial n’est pas exigée lorsque l’on n’est qu’en présence d’une “aggravation d’une lésion” qui était déjà apparue lors de la survenance de l’accident ou de la maladie (Soc. 11 avril 2002 n° 01-20.331 Soc. 15 mars 2001 n° 98-12.842 Soc. 16 novembre 2000 n° 99-11.027).



Tout ceci relève de l’évidence : pour prendre un exemple, si l’accident a fait apparaître des lésions du canal carpien et que ces lésions ont été prises en charge par la caisse au titre de l’accident du travail, alors l’aggravation de ces mêmes lésions du canal carpien constituent nécessairement une rechute de cet accident.



Cela montre que la “guérison” n’était “qu’apparente” que la “consolidation” ne l’était pas réellement.



En revanche, si la lésion initiale concerne le canal carpien et que la rechute concerne une sciatique, on est alors en présence de lésions de nature différente et il incombe à la victime de rapporter la preuve du lien de causalité direct entre la sciatique et l’accident de travail initial, car l’existence de ce lien n’est pas évidente compte tenu de tout ce qui a pu se produire entre l’accident de travail initial et la rechute.



Pour résumer: en matière de rechute, la preuve de l’imputabilité à l’accident initial n’est pas exigée lorsque l’on n’est qu’en présence d’une “aggravation d’une lésion” qui était déjà apparue et prise en charge lors de la survenance de l’accident ou de la maladie, alors que, s’il s’agit d’une “nouvelle lésion” qui ne correspond à aucune des lésions apparues lors de l’accident ou de la maladie, la victime doit démontrer qu’elle est la conséquence “directe et certaine” de l’accident du travail initial.



A cette aune, la définition et le régime juridique de la rechute gagnent en précision et la sécurité juridique des victimes, des organismes sociaux et des employeurs s’accroît.



En outre, il faut tenir compte de l’étendue temporelle de la présomption d’imputabilité et de ses répercussions sur la caractérisation d’une rechute.



En effet, « la présomption d’imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d’un accident du travail s’étend pendant toute la durée d’incapacité de travail précédant soit la guérison complète soit la consolidation de l’état de la victime » (Civ.2 9 juillet 2020 n° 19-17.626 B Civ.2 15 février 2018 n° 17-11.231 Civ.2 15 février 2018 n° 16-27.903 Civ.2 4 mai 2016 n° 15-16.895 B Civ.2 6 novembre 2014 n° 13-23.414 Civ.2 10 juillet 2014 n° 13-20.323 Civ.2 28 mai 2014 n° 13-18.497 Civ.2 13 mars 2014 n° 13-16.314 Civ.2 13 février 2014 n° 13-11.190 Civ.2 17 janvier 2013 n° 11-26.311 Civ.2 21 juin 2012 n° 11-19.228 Civ.2 31 mai 2012 n° 11-19.518 Civ.2 10 mai 2012 n° 11-17.526 Civ.2 5 avril 2012 n° 10-27.912 Civ.2 1 juin 2011 n° 10-15.837 Civ.2 28 avril 2011 n° 10-15.835 Civ.2 17 février 2011 n° 10-14.981 B) :


Civ.2 9 juillet 2020 n° 19-17.626 B

« La présomption d’imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, dès lors qu’un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d’accident du travail est assorti d’un arrêt de travail, s’étend à toute la durée d’incapacité de travail précédant la guérison complète »


Civ.2 4 mai 2016 n° 15-16.895 B

« Si la présomption d’imputabilité au travail s’attachant, en application de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, aux lésions survenues au temps et sur le lieu du travail s’étend aux soins et arrêts de travail prescrits ensuite à la victime jusqu’à la date de consolidation de son état de santé ou de sa guérison, elle ne fait pas obstacle à ce que l’employeur conteste devant la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale l’imputabilité à l’accident ou à la maladie initialement reconnus de tout ou partie des soins et arrêts de travail pris en charge ultérieurement par l’organisme »



Or l’étendue de la présomption d’imputabilité retentit nécessairement sur la caractérisation de l’existence d’une rechute.



Si l’existence d’une rechute est constituée par l’aggravation des séquelles des lésions de l’accident initial, il s’ensuit que, pour déterminer l’existence d’une rechute, la juridiction de sécurité sociale ne doit donc pas s’en tenir aux lésions qui sont mentionnées sur le certificat médical initial, mais elle doit rechercher si la lésion déclarée comme rechute n’est pas l’aggravation de lésions apparues avant la consolidation de l’état de santé de la victime et qui ont été prises en charge au titre de la législation professionnelle.